Questionnaire
de la
Commission Intermédiaire des Etats du Dauphiné
28 février 1789
Les Dauphinois n'ont pas eu à rédiger de cahiers de
doléances puisqu'ils ont répondu au questionnaire très détaillé que leur a
adressé la Commission Intermédiaire des Etats du Dauphiné, le 28 février 1789.
Ces réponses sont le reflet de l'image que veulent donner de leur cadre de vie
les habitants de chaque paroisse. On peut se demander si cette image correspond
bien à la réalité ou si, au contraire, elle n'a pas été noircie à dessein dans
la crainte de voir augmenter les impositions pesant déjà lourdement sur ces
communautés.
Les documents ont été consultés aux Archives Départementales des
Hautes-Alpes, à Gap : Bruis : cote C3.11; L'Epine : cote C5.4; Montmorin :
cote C8.2.2bis; Ribeyret : cote C10.6; Sainte-Marie-de-Rosans : cote C11.5.
Q) Quelle est l'étendue, par
aperçu, du territoire, et quelles sont les différentes paroisses, villages ou
hameaux qui la composent ?
Q) Quelle est la
population de la communauté ?
Q) Quelle est la manière
de bâtir et couvrir les maisons ? Y en a-t-il beaucoup de couvertes en paille ?
Y a-t-il des carrières en ardoises ou de petites lauses, ou des fabriques de
tuiles à portée, et quel en est le prix pour une toise de couvert ?
Q) Quelle est en général
la nature du sol ?
Q) Quels sont les
différents genres de récolte qui se perçoivent et les arbres fruitiers qui
prospèrent ?
Q) Quel est le rapport,
année commune, entre les grains et comestibles et la consommation des habitants
et quelle est leur nourriture ordinaire ?
Q) Quelles sont les
rivières ou torrents qui traversent la communauté, la qualité du terrain ou
celle des eaux ? Rendent-elles l'arrosage avantageux ? Quels seraient les
moyens d'en tirer un plus grand parti ? Les torrents font-ils de grands
ravages, et y aurait-il des moyens faciles de les prévenir ou d'en garantir les
fonds ?
Q) Quels sont les objets
d'industrie ou de commerce des habitants, les moyens d'amélioration dont ils
seraient susceptibles, et les établissements en ce genre qu'on croirait utiles
à la communauté ou au canton ?
Q) Quelles sont les
charges locales ou dépenses ordinaires de la communauté, les dettes de la
communauté ou les charges extraordinaires auxquelles elle peut être
tenue ?
Réponses
au questionnaire
|
|
Montmorin,
premier mémoire
|
|
servant
de réponse à la lettre que Messieurs les Procureurs généraux, syndics des Etats
du Dauphiné, ont écrite à la communauté de Bruis le 28 février dernier.
1 - 2) Le territoire de Bruis
confronte, du levant, celui de Montmorin; du couchant, celui de Sainte-Marie,
du midi, celui de Moydans et, de bise, celui de Valdrôme. Il a, du levant au
couchant, environ un quart de lieue et, de bise au midi, environ une lieue, et
est entouré de plusieurs coteaux ou montagnes. La communauté est composée d'un
chef-lieu et de huit hameaux1, qui sont composés en tout de 72
habitants et dont la population s'élève, compris les femmes et les enfants à
environ 430 personnes.
3) Il n'y a dans la communauté
ni médecin, ni chirurgien; les habitants sont obligés, en cas de maladie,
d'avoir recours à Montmorin, distant d'une demi-lieue, où il y a un chirurgien,
ou bien à Serres, où il y a des médecins et
chirurgiens, qui est éloigné de 5 lieues.
4) Il n'y a, non plus,
aucune accoucheuse, les habitants sont obligés de se servir d'une femme du lieu
pour cet effet.
5) Les habitants ne
connaissent point la qualité des maladies, n'y ayant aucun médecin, ni
chirurgien, pour le leur faire connaître, et ils ne pratiquent point
l'inoculation, faute de moyens.
6) Les habitations se
bâtissent à chaux et à sable, et plusieurs se couvrent en tuiles, mais la
majeure partie des maisons sont couvertes en paille, faute de tuiles, n'y ayant
dans ce lieu aucune fabrique de cette espèce, ni d'ardoises, sauf quelques
particuliers qui en fournissent seulement pour leur usage. La toise de couvert
en tuiles vient en raison de 9 livres et en paille 6 livres.
7) La nature du sol, en
général, est ingrate, le terroir étant presque tout de coteaux et bien
montagneux, en sorte que les grosses pluies emportent très souvent la
superficie des terres et les engrais que les habitants ont soin d'y mettre, de
manière que les récoltes ne sont pas considérables et produisent à peine pour
payer le travail et la peine du cultivateur. D'ailleurs, les habitants ne
peuvent pas bien engraisser leurs terres, n'ayant aucun bon pâturage pour
entretenir des bestiaux qui leur seraient d'une grande utilité. Les montagnes
qui bordent le territoire de Bruis ne produisent uniquement que des buis et
quelques genêts, et quelques petits pins, qui n'ont pas plus d'une toise de
hauteur; les habitants s'en servent pour faire des réparations à leurs fonds,
le long des torrents; à part cela, ils ne tirent aucun profit des productions
de ces montagnes, qui sont d'ailleurs très arides, n'y ayant aucun pâturage.
8) Il se perçoit dans la
communauté du blé, du seigle, de l'épeautre, de l'avoine et des légumes, mais
en très petite quantité; lorsque la récolte est bonne, il y en a pour l'usage;
mais on n'en vend point, sauf des noyaux, lorsque la récolte est bonne, encore
cela arrive-t-il bien rarement; pour ce qui est des fruits, les habitants en
ont annuellement, des poires, des pommes, etc. pour leur usage; ils n'en
vendent point.
9) Les habitants se
nourrissent du grain qu'ils récoltent; ils en font du pain bis et se
nourrissent encore des légumes, pommes de terre et fruits d'arbre. Lorsque le
blé leur manque, ceux qui sont à leur aise en vont acheter chez les fermiers du
voisinage, qui en débitent aux marchés de Serres et Veynes distants de 4 et 7
lieues.
11) Il n'y a point de
production surabondante dans le lieu, au contraire, il en manque toujours;
avant que les habitants ayent payé la dîme, les censes et les semailles,
souvent ils sont réduits à la misère et sont obligés d'aller passer l'hiver en
Provence ou en Languedoc pour gagner leur vie.
12) La communauté n'a point
de bois de haute futaie; il existe seulement, dans les bois qui lui
appartiennent, quelques pins et fayards dont les habitants se servent pour
bâtir et entretenir leurs bâtiments, le reste n'est que broussailles et ne peut
servir que pour leur chauffage. Le seigneur du lieu2, au contraire,
possède une forêt qui est complantée de fayards, frênes, sapins, etc. les
habitants n'ont point le droit d'y couper la moindre chose, ni d'y faire paître
leurs bestiaux.
13) Les communs de la
communauté ne consistent qu'en bois, broussailles, et ne produisent aucun
herbage pour y faire paître leurs bestiaux; la nature du sol étant très
mauvaise et aride et tout entrecoupée de rochers et ravins, qui souvent
détruisent l'herbe qui pourrait croître dans le sol. La communauté est en
procès avec le seigneur pour la terre gaste, le seigneur prétend qu'elle n'a
pas été toute albergée et en veut posséder une grande partie, mais la
communauté soutient que cette terre gaste a été entièrement albergée, en sorte
que c'est mal à propos que le seigneur lui a intenté un procès à ce sujet. Les
Etats sont suppliés d'accorder leur protection pour terminer cette affaire,
etc.
14) Le territoire est
traversé, du levant au couchant, par la rivière d'Oule, qui est assez
considérable, et par plusieurs autres torrents et ravins, qui causent de très
grands dommages aux fonds des particuliers aboutissants, et emportent souvent
les récoltes et rendent souvent l'arrosage des prairies comme impossible,
attendu qu'elles emportent la prise que les habitants font à ce sujet; en été,
ces torrents et ruisseaux sont à sec, en sorte que les habitants ne peuvent pas
s'en servir pour arroser. Pour se garantir de ces ravins et rivières, il serait
indispensable de faire construire des digues, mais les habitants, qui ne sont
pas riches, ne sont pas en état d'en faire construire. Les habitants de Bruis
n'ont la permission d'arroser leurs prairies qu'un jour et demi de la semaine,
de l'eau qui est au-dessus du moulin, parce qu'il faut que l'eau aille au
moulin, et encore ceux qui arrosent et qui aboutissent le canal du moulin, sont
obligés de l'entretenir chacun en droit soi. En temps de sécheresse, on ne peut
pas arroser suffisamment dans si peu de temps, en sorte que la récolte n'est
pas considérable; d'ailleurs, lors des grosses pluies, l'eau déborde dans les
fonds, empoisonne la récolte et laisse du gravier, qu'il coûte beaucoup aux
habitants de faire ôter.
15) Il y a dans la
communauté environ 13 paires de boeufs qui servent à plusieurs habitants pour
faire leur labourage, 8 mulets de petite taille et 28 bourriques, desquelles
quelques habitants se servent pour labourer, et environ 15 à 16 trenteniers de
menu bétail; comme il n'y a pas dans le territoire de bons pâturages pour les
nourrir, les habitants les nourrissent presque six mois de l'année des
fourrages qu'ils récoltent.
16) Dans la communauté il
n'y a aucun maréchal ni artiste vétérinaire; les habitants sont obligés de
soigner eux-mêmes leurs bestiaux en cas de maladie.
17) Il n'y a dans la
communauté aucun commerce ni industrie; les particuliers robustes vont passer
une partie de l'hiver, et même de l'été, en Provence, pour fournir à leur
subsistance. Il serait fort à propos que l'on établît dans le lieu ou aux
environs une fabrique en étoffes de laine ou en coton, pour empêcher que
plusieurs personnes ne s'expatriassent et pour que les habitants pussent, par
ce moyen, fournir à leurs besoins et payer les charges auxquelles ils sont
soumis qui sont très considérables.
18) La communauté est régie
par un châtelain, que le seigneur a droit de nommer, deux consuls et un
secrétaire-greffier; les habitants observent à ce sujet et supplient les Etats
d'établir une autre administration dont les charges fussent électives et qu'il
serait fort à propos que le Roi fît administrer sa justice, attendu que les
officiers du seigneur vexent la plupart du temps les habitants et les ruinent.
19) La communauté n'a aucun
revenu patrimonial ni d'octroi.
20) La communauté supplie
les Etats de lui permettre d'imposer les charges locales suivantes, sauf en cas
d'insuffisance à se pourvoir de nouveau par requête en permission d'imposer
pour les réparations qu'ils seront obligés de faire faire dans la communauté.
Ces charges locales consistent:
Pour l'entretien des couverts de l'église, maison curiale et maison
de ville …… Pour
le cierge pascal ………………………………………………………… Pour
le sonneur de cloche …………………………………………………… Pour
l'entretien des chemins …………………………………………….…… Pour
les gages des gardes …………………………………………………… Pour
les gages du secrétaire-greffier ………………………………….……… Pour
ceux du valet de ville ………………………………………….………… Pour
port de lettres et paquets ……………………………………….….…… Pour
le contrôle des délibérations ……………………………………………. Pour
le député aux assises …………………………………………..……….. Pour
les gages du maître d'école …………………………………..………… Pour
ceux d'une sage-femme ……………………………………..………….. Pour
le tirage de la milice ………………………………...…………………… Pour
les vacations du châtelain ……………………………………………….. Pour
les ponts et passerelles sur les torrents et ruisseaux ………..…….…….. Total3……………………………. |
33 6 12 50 120 20 9 12 12 15 66 15 21 27 30 448 |
La communauté doit encore
des dépens du procès qu'elle avait soutenu contre le seigneur au sujet des
censes et terre gaste, à différents particuliers pour lesquels la communauté
avait pris fait et cause en mains.
21) Les comptes des
collecteurs ont été rendus exactement; le collecteur de cette année s'est
trouvé même créancier de la communauté en une somme quelconque.
22) Les pauvres n'ont
d'autre revenu que la vingt-quatrième qui leur est distribuée annuellement par
M. le curé4 et les officiers municipaux; il consiste à peu près, année
commune, à environ 10 à 11 émines de blé.
23) Il n'y a aucune
fondation dans la communauté ni pour les hôpitaux, ni pour l'éducation
publique.
24) Le parcellaire et le
coursier de la communauté sont en très mauvais état et doivent être refaits; ils
sont sans date5; les papiers de la communauté sont dans les archives6
à deux serrures, dont le châtelain a une clef et le premier consul une autre).
L'allivrement du bien noble
appartenant au seigneur et au prieur monte à 6 l. 6 s, celui de la communauté
qui possède les biens roturiers monte à 34 l. 7 s. Les habitants payent la dîme
des grains au prieur à la cote vingtième.
Les biens fonds du prieuré
sont nobles et les mieux placés du pays, et sont allurés 30 s. 9 d. et demi.
Le seigneur a une étendue
considérable de fonds dans le territoire de Bruis, qui est le meilleur du pays
et situé tout dans la plaine, son allivrement est de 4 l. 15 s. 17 d. et demi.
Les habitants sont obligés de payer au seigneur une cense personnelle de 3
émines par habitant et, outre cela, 3 civayers par personne, pour droit de
fournage; ceux qui labourent payent également 1 émine 9 civayers de cense au
seigneur, quand même plusieurs particuliers se serviraient d'une même paire de
boeufs; plus, les habitants payent encore deux corvées.
Outre les charges ci-dessus,
il faut payer pour l'entretien des grands chemins de Veynes à Laragne, qu'on a
donné à prix fait, à cause que les corvées ruinaient les habitants; il faut
payer, tous les ans, 129 livres au sieur Ollier, de Serres, qui en pris le prix
fait, il semble qu'il serait raisonnable que chaque communauté entretînt les
chemins dans son terroir.
Les habitants payent au
seigneur un droit de mouture à la cote vingt-septième, mais c'est mal à propos,
puisque le seigneur, qui est obligé de tenir deux meules dans son moulin, n'en
tient qu'une, en sorte que les habitants ne peuvent faire moudre leur grain
comme il faut, ce qui est un abus que les Etats sont suppliés de faire
corriger; comme aussi il serait nécessaire d'avoir un peseur dans le moulin;
n'y en ayant point, il est libre au meunier de tromper et de faire payer aux
habitants un droit de mouture plus considérable, ce qui est également un abus
pour lequel les habitants supplient les Etats de vouloir bien faire pourvoir à
ce sujet.
Fait et dressé au lieu de
Bruis, le 14 avril 1789, et signé par Jean-Emmanuel Bompar, député de ladite
communauté à cet effet.
Signé: J. BOMPAR
(1)
Les Arches, Clot d'Autouret, Clot de Jacques, la Combe, Fontelettes, Gaut, Malafoux,
le Prieuré, le Serre, la Tour, etc.
(2)
César de Vincens de Mauléon, époux de Françoise de Rivière et leurs
descendants.
(3)
Suivant l'Etat des charges locales (C 107fx13), le total desdites charges était
: en 1788, de 427 l. 7 s. 9 den 1789, de 442 l. 7 s. 9 det en 1791, de 922
livres, parmi lesquelles: pour le maître d'école, 30 livres; "pour les
frais d'un député envoyé à Gap", 15 livres; réparations à la maison
commune, 236 livres; tirage de la milice, 12 livres, etc. (Ordonnances du 27
septembre 1790 et du 20 novembre 1791).
(4)
Mathieu Maffren, d'Izon (Drôme), 1781 - 1792
(5)
Le parcellaire date de 1590; il a été fait par Nicolas Blanchard; in-4x de 360
feuillets. Autre cadastre de 1608 in-4x de 300 feuillets
(6)
Sur la situation de ces archives en 1887, voir Procès-verbaux du Conseil
général des Hautes-Alpes, août 1888, p1-152.
sur les
instructions demandées
par MM.
les Procureurs généraux, syndics des Etats du Dauphiné,
par
l'ordre dont au mémoire joint à la lettre du 28 février dernier
1) L'Epine est un village situé
dans les montagnes des Baronnies, éloigné de Serres de deux lieues, mauvais
chemin. Il n'y a qu'une paroisse, composée de six hameaux, compris le chef-lieu1;
le territoire est d'environ trois lieues de circuit.
2) Il y a dans cette
communauté environ 400 personnes.
3) Il n'y a, sur les lieux,
ni médecin ni chirurgien; l'endroit le plus près de l'Epine où il y a des
médecins est éloigné de deux lieues
4) Il n'y a sur les lieux,
ni à proximité, aucune accoucheuse instruite
5) La communauté n'a pas été
attaquée depuis quelque temps de maladies épidémiques; l'inoculation de la
petite vérole n'est pas en usage
6) La manière de bâtir et
couvrir les maisons est à chaux et sable et couvertes en tuiles, y ayant une
fabrique de tuiles, au prix de cinq livres la toise.
7) La nature du sol est, en
général, aquatique et de médiocre qualité.
8) Le genre de récoltes
consiste en blé froment; la majeure partie d'icelle est en épeautre ou avoine;
les arbres n'y réussissent pas.
9) Les grains qui s'y
perçoivent, année commune, à peine suffisants pour la consommation, et la
nourriture de presque tous les habitants est du pain d'épeautre ou avoine.
10) Dans les années de
disette, on n'a, pour ainsi dire, aucune ressource, et les habitants sont
obligés de s'expatrier pour un temps.
11) Il n'y a aucune
production surabondante. Il y a deux petites foires, si peu connues, qu'elles
ne sont pas du tout fréquentées.
12) Il n'y a aucune forêt,
n'y ayant que quelques bois pin, broussaille, qui n'est propre que pour bois de
chauffage.
13) Les communes sont de peu
d'étendue et de mauvais sol; on ne voit aucun moyen de les rendre plus utiles.
14) Le ruisseau de Blême
traverse le terroir, du levant au couchant, lequel ne donne que de l'eau en
temps de pluie et la fonte des neiges, n'y ayant aucun arrosage avantageux. Ce
ruisseau ou les ravins qui s'y jettent dedans inondent souvent les bas-fonds;
l'on pourrait les garantir par quelque fortification.
15) Il n'y a dans la
communauté que 40 boeufs, y compris ceux qui sont au domaine du seigneur, et
autant de mulets ou bourriques, n'y ayant pour tout avérage qu'environ 1.200 ou
1.250 bêtes, de très petite espèce, n'y ayant pas moyen de se procurer
davantage d'élèves, ni d'améliorer les espèces.
16) Il n'y a aucun artiste
vétérinaire, ni maréchal expert.
17) Il n'y a aucun objet
d'industrie ni de commerce, la pauvreté des habitants les en empêche.
18) Les affaires de la
communauté sont régies par deux consuls qu'on change toutes les années.
19) La communauté n'a aucun
revenu.
20) Les charges locales de
la communauté consistent annuellement, pour un maître d'école, entretien des
bâtiments, garde-bois et chauffage, logement d'un vicaire, et autres, pouvant
arriver, année commune à la somme de 300 livres2.
21) Les comptes des
collecteurs se rendent annuellement.
22) Les pauvres n'ont
d'autre revenu que la somme de 100 livres annuellement, dues par le seigneur
dudit lieu, et la vingt-quatrième, qui sont distribuées chaque année aux
pauvres, par le curé du lieu et les officiers de la communauté.
23) Il n'y a point de
fondation, ni pour l'hôpital ni pour l'éducation des enfants, n'y ayant point
d'hôpital.
24) Le parcellaire de la
communauté a été fait en l'année 16453 et est en très bon état;
celui des coursiers n'est pas de même; les papiers et titres sont conservées et
dans les archives4.
Nous, officiers de la
communauté de l'Epine, certifions tous les articles ci-devant véritables.
Audit l'Epine, le 25 mars
1789
Signé : TARASCON, châtelain,
P. GIROUSSE, consul, BONNET secrétaire
(1) L'Eglise, la Péguière, les Pères, Rouzas, Savel, la Villette.
(2) Les charges locales de l'Epine, en 1789, ne sont pas exactement connues. Celles de 1790 sont de 332 livres, savoir : entretien de l'église, 30 livres; entretien des fontaines, 12 livres; entretien des ponts et passerelles, 20 livres; gages du maître d'école, 150 livres; gages du garde-champêtre, 60 livres; gages du valet de ville, 12 livres; transport des pauvres malades et soldats, 12 livres; logement du vicaire, 12 livres; gages de la sage-femme, 6 livres; etc. (Ordonnance du 6 octobre 1790). En 1791, les charges sont les mêmes, et, en plus, gages du secrétaire-greffier, 40 livres; gages du receveur des contributions, 220 livres; etc. Total, 536 livres (C 107, f°181).
(3) "Livre terrien", par Melve, géomètre de Manosque; in-fol. 402 feuillets. Autre "Terrier", de 1666; in-4° de 304 feuillets
(4) Sur l'état de ces documents en 1887, voir Procès-verbaux du Conseil général des Hautes-Alpes, août 1888, p.153-154.
Réponses
aux observations, pour la communauté de Montmorin,
suivant
l'avis de MM. les Procureurs et syndics du pays de la province
suivant la lettre du 28 février 1789.
1) La communauté de Montmorin est située dans un petit
vallon fort étroit, entouré de montagnes fort hautes, n'étant que des rochers
et de mauvaises broussailles n'étant d'aucun produit, n'y ayant ni buis ni
chêne; qui, depuis la terre de Ribeyret, qui est au nord, jusqu'à celle de
Bruis, qui est au couchant, peut avoir une lieue, et depuis celle de Valdrôme
jusqu'à celle de Moydans, peut avoir trois quarts de lieue, [n'] étant que de
mauvaises montagnes garnies de rochers, étant de même sujettes aux ravins en
temps de pluie; que la communauté est composée d'un village de 90 habitants,
d'un hameau à Serre-Boyer, de 30, d'un hameau à Chatuze, de 12, et de 3 à celui
du Gua, ce qui fait en tout 135 habitants.
2) Il y a dans la communauté
environ 650 personnes.
3) Il y a un chirurgien sur
lieu, âgé d'environ 70 ans; après lui, les habitants seront obligés d'en aller
chercher un à la Motte ou à Serres, éloignés de trois lieues.
4) La communauté n'a jamais
été attaquée par des maladies épidémiques. On ne pratique point du tout
l'inoculation de la petite vérole.
5) Les maisons sont
couvertes en tuiles, bâties de mauvaise terre et à chaux. Il y a environ
cinquante granges couvertes en chaume, n'y ayant aucune fabrique de tuiles,
étant obligé d'en aller chercher à deux lieues. Ce qui revient compris le port,
à 9 livres la toise.
6) Le sol, en sa nature, est
en général très mauvais, n'y ayant rien sur les montagnes pour améliorer les
fonds. D'ailleurs, le vallon est susceptible à la mauvaise grainaison, attendu
que la montagne d'Allons couvre le soleil pendant l'été jusqu'à 8 heures,
qu'alors le soleil, étant dans toute sa force, la rosée étant encore sur les
blés, il arrive toujours que les blés sont rouillés et sont mûrs sans grain.
7) N'ayant dans ladite
communauté que très peu de froment et de seigle et d'épeautre, et très peu de
légumes. Il n'y a d'arbres fruitiers que quelques vieux noyers et de mauvais
pommiers, n'y ayant aucunes vignes.
8) Il manque ordinairement
dans la communauté annuellement du grain pour six mois; que la nourriture
ordinaire des habitants n'est que du pain de seigle, d'épeautre, quelque peu de
légumes, des pommes de terre, des herbes, attendu qu'ils sont obligés de vendre
le peu de froment pour payer les charges et les droits seigneuriaux.
9) On est obligé en temps de
disette d'aller chercher du blé à Nyons, et les autres années à Veynes ou ses
environs, à six lieues de la communauté.
10) Il n'y a aucune
production surabondante; ni marché ni foire sur les lieux.
11) La communauté n'a aucuns
bois ni forêts; quand il arrive quelque incendie, on est obligé d'en acheter
des communautés voisines, n'ayant qu'un petit bois de fayard pour les outils de
labourage.
12) Il n'y a dans ladite
communauté qu'une petite rivière appelée la Val d'Oule, qui prend sa naissance
du côté du levant, pour servir d'arrosage, et qu'il n'y a point d'eau du temps
de sécheresse; que le rif Abrard, venant du côté du nord, traînant de gros
graviers et se jetant dans la rivière, a engravé ou emporté environ six mille
toises des meilleurs fonds; que le béal la Grave et le béal des Jonches, venant
du côté du midi, ont engravé la majeure partie des prés des Jonches et du pré
la Cour; que la plupart des habitants, faute de subsistance, de moyens, sont
obligés de l'abandonner; que lesdits torrents pourraient se garantir avec du
plan vif et le secours des Etats, et que
lesdits torrents, l'eau y tarit totalement dans les mois d'août et de
septembre, ce qui est cause qu'il n'y a point de jardinage.
13) Il n'y a dans la communauté
que 15 paires de boeufs, 12 petits mulets, 25 bourriques et 400 bêtes
d'avérage, n'en pouvant pas entretenir davantage, attendu que les eaux
emportent presque tous les fourrages.
14) Il n'y a aucuns
maréchaux experts sur les lieux ni aucun artiste, ni aux environs.
15) Les habitants n'ont
aucune industrie; la plupart sont obligés de s'expatrier; les uns s'en vont
dans le mois de juin dans la Provence, pour cueillir des feuilles pour les vers
à soie, d'autres pour moissonner les blés; les autres s'en vont au mois d'août,
pour aller peigner du chanvre dans le Languedoc, la Provence et le Comtat,
étant obligés de laisser tous leurs travaux.
16) La communauté est régie
par un châtelain, pour autoriser les assemblées, et deux consuls, qu'on nomme à
la pluralité des voix tous les ans.
17) La communauté n'a aucuns
revenus d'octroi ni patrimoniaux
18) Les charges locales
consistent :
En premier lieu, cent cinquante livres pour un maître d'école, ci.....……………….....………………………. |
150 l |
19. Plus, pour un garde-terre, cent cinquante livres, ci.........................……..................…………………..…. |
150 l |
20. Plus, pour l'entretien du couvert de l'église et de la maison de ville et le cimetière, deux cents livres, ci...... |
200 l |
21. Plus, pour les fontaines publiques, cent livres, ci..........................................……………………………. |
100 l |
22. Plus, cent livres pour le cierge pascal ou
pour la pension du four, ou pour celle due au seigneur de l'Epine, ou autres petites affaires pour la communauté, ci ………….... |
100 l |
23. Plus, celle de deux cents livres dues au sieur
Colletin de Rosans, pour avoir raccommodé les fontaines publiques, ci.............………….................................……………… |
200 l |
24. Plus, celle de cent livres pour l'entretien des chemins royaux, ci1 ............……………………….............. |
100 l |
25) Les dettes de la
communauté sont, premièrement, que les habitants doivent le vingtain des terres
gastes et qu'ils doivent 712 livres au seigneur pour censes personnelles ou
foncières, de même qu'il a innové la cense de ceux qui tiennent des
domestiques, de même que les vingtains, et qu'il y a quelques habitants qui
doivent des corvées.
26) La communauté paye le
vingtième de tous les grains et du chanvre, qui se perçoivent dans la
communauté, au prieur2.
27) Le sieur prieur possède
un domaine considérable qui est en allivrement 14 sols, qui est noble.
28) Le curé3
possède trois fonds, qui sont roturiers.
29) Le seigneur possède des
fonds nobles au-dessous du village, ce qui se monte en allivrement à 3 livres
annuellement.
30) Plusieurs particuliers
possèdent plusieurs fonds nobles. Ce qui revient audit seigneur à 160 livres,
montant d'allivrement 4 l. 10 s.
31) La communauté paye des
charges royales 2.230 livres, 700 livres de capitation et 593, ce qui fait en
tout 3.523 livres.
32) Les comptes du
collecteur et des consuls sont rendus exactement toutes les années.
33) Les pauvres n'ont que 3
livres de revenu toutes les années, et la vingt-quatrième arrive à huit émines
blé et huit émines seigle.
34) La communauté n'a aucuns communs.
35) Il n'y a aucunes
fondations ni aucuns hôpitaux.
36) Le parcellaire a été
fait en l'année 17004; il est en mauvais état, de même que le
coursier; les papiers de la communauté sont déposés dans un coffre de la maison
de ville, fermé à deux clefs, dont chaque consul en a une5.
Nous, officiers municipaux
de la communauté et notables, certifions le présent état véritable, pour être
présenté à MM. les Procureurs et syndics des Etats du Dauphiné.
A Montmorin, le 1er avril
1789
Signé : DULTIER, E.
GIROUSSE, M. ROLLAND, Fer. VIAL, JULLIEN, COLOMB,
J. Daniel VERDIER, A.
CHAGNARD, Jean CLAUDE, Louis TENON,
L. MARTIN, consul, P. FAURE,
consul, DULTIER, châtelain, FAURE, secrétaire-commis.
(1) Ces chiffres ne correspondent
pas à ceux fournis par l'Etat souvent cité, dont le total pour 1789 est de 364
l. (Ordonnance du 25 novembre 1788) : cierge pascal, 6 livres, entretien de
l'église, 24; logement du vicaire, 15; entretien des fontaines, 15; entretien
des ponts et passerelles, 15; gages du secrétaire, 21, gages du garde-bois, 30;
gages du sonneur, 6, port de lettres, 6; pension au seigneur à raison du four
banal, 15; pension aux pauvres, 3; pension au seigneur de l'Epine, 12; reliquat
dû à Jos. Reymond, consul en 1786, 157 l. 12 s.; gages de la sage-femme, 6;
entretien des chemins vicinaux, 12; frais du tirage de la milice, 12, etc. (C 107, f°70)
(2) Le prieur de
Bruis, de qui dépendait la cure de Montmorin.
(3) Henri Rambaud,
de Chabottes en Champsaur, curé au moins dès le 26 août 1783, remplacé le 20
novembre 1792 par Pierre-Daniel Garagnon, d'Aspres-sur-Buech, "curé
élu" (L 119). Cf l'Introduction de G VI, p. CXLVI.
(4) Actuellement il est incomplet; in-folio, feuillets 7 à 303.
(5) Sur l'état des archives de Montmorin en 1887, voir Procès-verbaux du Conseil général des Hautes-Alpes, août 1888, p. 156.
Réponses
pour la Communauté de Montmorin,
suivant
les lettres de la Commission intermédiaire
1) La communauté de Montmorin paye annuellement au
seigneur dudit lieu, paye aux moulins banaux, la moitié au quarante et les
autres au vingt. Que, pour aller audit moulin, il ne se trouve aucun chemin,
attendu que le seigneur nous prive de passer dans son fonds.
2) Qu'il fait payer le vingtain des terres gastes,
aussi de quelques autres terres qui n'avaient jamais été payées à M. de la
Charce.
3) Qui se paye des censes des domestiques. Egalement
on n'en avait jamais payé.
4) Que la communauté paye des censes cent cinquante
émines blé froment.
5) Qu'il y a environ vingt particuliers1
qui doivent audit seigneur et environ quinze habitants qui payent deux corvées
de boeufs.
6) Que sur les reconnaissances, il n'y a que du gros
blé, et on l'a réduit à du blé froment mondé. Qu'ils payent les lods au sixième
denier. Que le village est sur une hauteur en forme d'amphithéâtre. Que les
eaux pluviales tombent dans son pré, attendu que les jardins des particuliers
en sont privés par ledit seigneur.
Ladite communauté paye encore au seigneur prieur le
vingtième de tous les grains, tant blé que seigle, épeautre, que les légumes et
l'avoine, et paye aussi la vingt-cinquième partie du chanvre, et que les
semences se devraient au moins lever.
Qu'il y a une lampe au choeur que le sieur prieur
tient; que la communauté est obligée de fournir l'huile, attendu que dans tous
les environs le sieur prieur doit la lampe ardente.
Que, attendu que la communauté paye la vingtième
partie de tous ses grains et que les curés sont à 700 livres, ils devraient au
moins ne payer aucun casuel audit curé, au contraire que les curés des
paroisses se font payer pour les
mariages et pour les sépultures au plus haut tot (taux), tant des uns que des
autres sans distinction.
Nous, officiers municipaux et notables de la
communauté de Montmorin, certifions le présent état véritable pour servir à ce
que de raison.
Audit Montmorin, le 10 mai 1789
Signé : P. FAURE, consul, L. MARTIN, consul, J.
ROLLAND, DULTIER, J. D. GIROUSSE, E. GIROUSSE, J. COLLOMP, Louis TENON, FAURE.
(1) Habitant le chef-lieu ou les hameaux : Chatusse, les Gendres, Gaudissard, Serre-Boyer.
aux
observations demandées
par la
lettre de MM. les Procureurs généraux des Etats de Dauphiné
du 28
février dernier et au mémoire y joint.
1 et 2) Le lieu de Ribeyret
est composé de 85 habitants formant un village contigu de 35, le reste dispersé
en granges éloignées du village et éparses dans le terroir1, qui est
situé contre une montagne formant une élévation inclinant de la bise au midi,
exposé aux irruptions des torrents causés par les pluies fréquentes, confinant
le tout, au levant, la terre de l'Epine; midi, la terre de Montjay; couchant,
celles de Saint-André et Moydans, et de bise, la terre de Montmorin. Tout le
pays comprend environ 450 personnes, grandes ou petites.
3) Il n'y a aucun médecin ni chirurgien sur les
lieux; les plus prochains sont au lieu de Serres, éloigné de trois lieues de
distance.
4) Il n'y a point
d'accoucheuses instruites dans le lieu ni aux environs.
5) Il n'y a pas non plus de
maladies épidémiques. On ne connaît pas l'inoculation de la petite vérole.
6) On bâtit avec de la
terre, n'y ayant point de sable. Les couverts sont en tuiles, à l'exception de
quatre habitants grangers, qui sont couverts en chaume. On fabrique des tuiles
à l'Epine, éloigné d'une lieue, au prix de 4 livres par cent, qui font une
toise de couvert, non compris la voiture.
7) Le sol de la communauté
est d'une médiocre production, ne produisant que de trois à quatre pour un.
8) Les récoltes de ce lieu
ne consistent qu'à une seule, en froment, seigle, épeautre et avoine, n'y ayant
que peu ou point d'arbres, poiriers d'hiver, qui ne produisent aucuns fruits,
attendu la rigueur des hivers qui règnent à Ribeyret, exposé aux ouragans.
9) Les grains qui se
perçoivent lui suffiraient pour nourrir les habitants si tout s'y consommait;
le seigneur2 ou ses fermiers et le sieur prieur3 vendant
leurs grains à l'étranger, les habitants sont obligés de recourir aux marchés
de Serres ou de Rosans, éloignés de trois à quatre lieues de marche, pour en
acheter, se nourrissant la plupart de pommes de terre, d'épeautre ou avoine,
forcés de s'expatrier pendant trois ou quatre mois de l'année, les uns en
mendiant leur pain, les autres pour peigner du chanvre dans la Provence, Comtat
et Languedoc, et d'abandonner ainsi la culture des biens de leur patrie pendant
ledit temps.
10) Les productions
surabondantes de ce lieu appartiennent au seigneur, qui possède trois domaines
nobles, outre lesquels il retire des habitants 120 émines de blé pour cense, la
vingt-sixième portion du revenu des habitants qu'il prend sur l'aire, les lods
des fonds à la cote sixième et ceux des bâtiments qui se vendent au tiers
denier de ce prix. Il possède un moulin et un four banal; il force les
habitants grangers d'y venir faire leur pain, qui se gèle en temps d'hiver; il
exige de chaque habitant sept journées pour travailler ses fonds, et gratis. Le
sieur prieur dudit lieu perçoit la dîme à la cote vingtième sur tous les
grains, outre un petit domaine qu'il possède audit lieu et un autre domaine
formant une chapelle appartenant à un chanoine de la cathédrale de Gap.
11) Il n'y a point de foires
ni aucuns bois propres à la bâtisse, mais quelques mauvaises broussailles en
pins, servant au chauffage des habitants.
12) La communauté n'a aucuns
communs.
13) Il y a un ruisseau qui
traverse du levant au couchant, appelé l'Esclate, qui devient débordé dans le
temps des pluies, emporte partie des fonds riverains et ne sert point à
l'arrosage des fonds, étant à sec en été.
14) Il n'y a dans cette
communauté que 15 à 18 paires de boeufs, compris les 4 paires qui servent au
labourage des domaines nobles du seigneur, et 500 bêtes d'avérage, compris 200
qui sont sur les mêmes domaines du seigneur
15) Il n'y a aucun artiste
ni maréchal expert, pas même aucun maréchal pour ferrer les boeufs, ni les
outils de labourage, les habitants étant obligés de recourir à l'Epine ou à
Saint-André-de-Rosans.
16) Il n'y a non plus aucun
commerce dans ce lieu, ni d'autre industrie que celle du peignage du chanvre
dans le Comtat, Provence ou Languedoc.
17) La communauté est régie
par deux consuls, qu'on élit, chaque année, à la pluralité des voix, et d'un
châtelain, qui préside les assemblées, nommé par le seigneur.
18) Elle n'a aucuns revenus
d'octroi ni patrimoniaux.
19) Elle paye pour charges
locales, année commune, environ 250 livres pour l'entretien d'un maître
d'école, d'un garde champêtre, d'un crieur public, d'un marguillier, pour
l'entretien de l'église, du cimetière, des frais d'administration, etc.4
20) Les charges
extraordinaires après les droits du Roi sont : le local, les censes, le
vingt-sixain dû au seigneur, la dîme du sieur prieur, qui produit, compris les
biens fonds qu'il possède, plus de 2.000 livres de rente.
21) Les comptes de la communauté
se rendent annuellement par deux auditeurs que la communauté nomme, en la
présence du châtelain et des consuls; les derniers ont été rendus l'année
dernière.
22) Les pauvres n'ont
d'autre revenu que la vingt-quatrième de la dîme. On a établi dans ce lieu un
grenier pour les pauvres, pouvant y avoir 120 émines blé, qui ont été données
par des habitants charitables et qu'on distribue auxdits pauvres dans leur
besoin. Ils le rendent à la récolte; ce qui est géré par les consuls.
23) Il n'y a aucune
fondation pour hôpital ni pour l'éducation publique; la communauté paye le
maître d'école, qu'on ne peut tenir que quatre mois l'année.
24) Le parcellaire et le
coursier ont été faits depuis environ quarante ans5; ils sont déposés,
de même que les papiers de la communauté, dans un petit coffre en bois blanc,
ne fermant qu'avec une mauvaise serrure6.
La communauté avait un
procès avec le seigneur, à raison de la perception de son droit de champart,
qu'il prenait sans distraire la dîme du prieur; il a été terminé. Elle est sur
le point de lui demander la communication de ses titres pour connaître les
droits qu'il exige sur eux.
Nous, consuls et notables
habitants de la communauté de Ribeyret, certifions le présent véritable, audit
Ribeyret, le 30 mars 1789. Et avons signé ceux qui l'ont su, non les autres,
pour être illettrés, enquis et requis.
Signé : J. JOUBERT, consul,
J. LOMBARD, J. RICHAUD, F. RIPER, GAUTIER, J. ROUX, J. ARNOUX, A. JACOB, Henri
MANEN, A. VINCENT, TOURRèS, Pierre BERBEYER, M. MARROU.
(1) Aux lieux dits : Arboudeyase, Armanenche, Grimes, l'Ubac, Joubert.
(2) Le Long de Dreneuk, qui avait épousé Catherine Martin de Champoléon, dame dudit lieu, de Chorges et autres places. Ce seigneur fut obligé d'émigrer et son château de Chorges fut pillé le 4 avril 1793 et peu après complètement démoli. (Voir "Période révolutionnaire dans les Hautes-Alpes", Gap, 1895,.p.23 p)
(3) Le prieuré-cure de Ribeyret, sous le vocable de Saint-Pierre-ès-Liens, dépendait du prieuré de Saint-André-de-Rosans, ordre de Cluny. Le prieur, Antoine Mauduech, de Claret (Basses-Alpes), nommé le 21 octobre 1752 (G 11, p.250), archiprêtre le 4 octobre 1780 (ibid.p.101), exerçait ses fonctions le 5 janvier 1791 (L 826), époque où il refusa de prêter serment à la constitution civile du clergé.
(4) Le total des charges locales en 1789 n'est pas connu. Celui de 1790 est de 216 livres (ordonnance du 8 sept.1789) : cierge pascal, 6 livres; entretien de l'église, 24; entretien des fontaines, 6; gages du secrétaire, 24; gages du maître d'école, 100; gages du garde-bois, 50; gages du valet de ville, 6; plus, 141 l. pour reliquat du compte d'Ant.Vincent, consul en 1786-1787 (C 107, f°84)
(5) En 1741, par René Armand, notaire de la Baume-des-Arnauds; in-folio de 125 feuillets. Autres cadastres, de 1637, par Jaume Gautier, etc., in-4°, et de 1666, par Richaud, Allier, etc., id. (Liste des anciens cadastres, 1885, p.10)
(6) Quelques débris de ces archives ont été envoyés au dépôt départemental en 1882; ils forment trois articles. (Cf. Procès-verbaux du Conseil général des Hautes-Alpes, août 1888, p.159)
par les
consuls et communautés de Sainte-Marie, élection, subdélégation de Gap,
à la
lettre à eux écrite par MM. les Procureurs généraux, syndics de la province,
le 28
février 1789.
1) Le territoire de Sainte-Marie,
qui est bordé, à droite et à gauche, par des montagnes inaccessibles, a une
demi-lieue de long sur autant de large. Il est composé de 24 habitants, dont 22
dans le village et 2 forains1.
2) Ces 24 habitants
composent 130 personnes, compris les femmes et les enfants.
3) Il n'y a dans le village
de Sainte-Marie ni médecin ni chirurgien. En cas de maladie, ils sont obligés
de se pourvoir à la Motte-Chalancon ou à Serres, distant de quatre lieues.
4) Il n'y a, à Sainte-Marie,
aucune accoucheuse instruite pour les accouchements, ni aux environs. Les
habitants se servent d'une femme du lieu.
5) La communauté n'a pas de
maladies épidémiques, mais il y règne des fièvres malignes et putrides parfois.
On ne connaît pas, dans cette communauté, l'inoculation; d'ailleurs les
habitants, par misère, ne peuvent en user.
6) L'usage du pays, pour la bâtisse, est de bâtir à
chaux et à sable et en pierres brutes. Le sable est de mauvaise qualité, ce qui
fait que les murs ne font pas un long usage. La moitié des maisons sont
couvertes en tuiles creuses et l'autre moitié en paille. Il n'y a dans la
communauté aucune carrière d'ardoises, ni aucune fabrique de tuiles. Les
habitants sont obligés de se pourvoir à l'Epine, distant de trois lieues. Pour
la charpente, ils se servent du bois de pin ou de fayard, dont l'exploitation
est pénible et difficile, et encore l'espèce manque-t-elle. La toise de couvert
en tuiles creuses revient à 9 livres et la toise en paille ou en chaume à 6
livres.
7) La nature du sol, en général,
est mauvaise, y en ayant la moitié franche en friche par la mauvaise qualité du
terrain.
8) Les habitants récoltent
sur le terrain cultivé un peu de froment, un peu de seigle et la majeure partie
en épeautre et autres petits menus grains transaux. Il n'existe dans les fonds
cultivés que des arbres noyers, qui produisent peu, attendu que toutes les
années il en périt la majeure partie par la gelée.
9) Les habitants ne
récoltent que pour vivre la moitié de l'année. Ils sont obligés de payer au
prieur2 la dîme au vingt, et au seigneur à la même cote, outre les
droits de taisse qui relèvent, dans différents quartiers, à la cote huitième;
outre cela, elle paye 2 émines de cense personnelle par habitant, 2 civayers
par chaque tête de droit de fournage. Quantité de fonds sont encore soumis à
des censes réelles en blé, en argent et en poules, à un tel point que, la
récolte perçue, les habitants ne récoltent pas en blé pour acquitter les dîmes,
les censes personnelle et foncière et droit de fournage et censes réelles, le
droit de tasque, et, pour subvenir à acquitter les impositions, ils sont
obligés de vendre une partie des mêmes grains qu'ils ont recueillis. Ensuite
les hommes sont obligés d'aller passer l'hiver en Provence pour faire subsister
les femmes et les enfants; ce qui fait qu'il manque annuellement un tiers des
grains indispensables à la nourriture, ne se nourrissant que de seigle,
épeautre et pommes de terre.
10) Dans les années de disette
et annuellement, les habitants sont obligés de se pourvoir aux marchés de
Serres et de Veynes, distant de quatre et sept lieues.
11) Il n'y a, dans la
communauté, aucune production surabondante, ne pouvant suffire pour l'usage des
habitants. Il n'y a ni foire ni marché
12) Il existe, sur le sommet
des montagnes qui bordent le terroir, quelques arbres pins et fayards, et le
bas de ces mêmes montagnes est garni de genêts et autres menues broussailles,
de sorte que les bois peuvent à peine suffire pour l'usage des habitants.
13) Les communs qui existent
dans le territoire sont de mauvaise qualité et indispensables pour le pâquerage
du menu bétail.
14) Le territoire est traversé par la rivière
d'Oulle, qui emporte, dans les grosses crues, les fonds cadastrés qui la
bordent à droite et à gauche, et parfois elle submerge même la partie du
terroir qui est en plaine et gâte la récolte en foins et autres productions.
Cette même rivière pourrait être contenue par des levées de gravier et de plant
vif. Mais, dès qu'elle a emporté les fonds cadastrés, le seigneur s'empare, par
droit de régale, des délaissés et graviers, et les unit à sa possession, y en
ayant déjà réuni environ 90 éminées. Le seigneur possède, dans le village, le
tiers du territoire et au delà et tout autour du village; l'allivrement
roturier ne montant qu'à 11 l. 5 s. et celui du seigneur montant à 8 l.3 s. Les
eaux de cette rivière servent à l'arrosage des prairies et moulin du seigneur
pendant six jours de la semaine et les habitants n'en usent que pendant deux
jours. Dans le même territoire, il descend des montagnes plusieurs ravins qui
causent beaucoup de mal et engravent beaucoup de fonds, les habitants étant
obligés, pour arroser leurs prairies, de mettre l'eau et de curer le canal à leurs
frais, ce qui emporte au moins 100 journées, année commune.
15) Dans la communauté, il
n'existe que 2 paires de boeufs, 15 bourriques, étant obligés de faire labourer
leurs terres par des étrangers, et environ 100 bêtes d'avérage. La misère,
privant les habitants d'en tenir un plus grand nombre, qui leur seraient
indispensables pour bonifier leurs terres qu'ils travaillent à bras pour la
plus grande partie.
16) Il n'y a dans la
communauté aucun maréchal, ni dans les environs. Ils sont obligés [eux-] mêmes
de soigner les bestiaux en cas de maladie.
17) Les habitants n'ont
aucun commerce ou industrie, ne s'occupant qu'à cultiver leurs fonds, en été,
et, en hiver, ils s'expatrient. Si on établissait quelques manufactures de
laine, cela pourrait donner moyen aux habitants de subsister.
18) La communauté est régie par 2 consuls et 1
châtelain. Il serait essentiel, pour le bien public, que toutes les charges
fussent électives. L'administration en serait plus légale et plus utile au
public. Il serait également essentiel que le Roi fît lui-même administrer sa
justice pour éviter la vexation.
19) La communauté n'a aucun
revenu d'aucune espèce. La rivière d'Oulle parfois est inguéable. Il serait
indispensable aux habitants d'avoir un pont sur celle-ci.
20) La communauté pourvoit à ses besoins par les
impositions des charges locales, qui consistent en la somme de 50 livres, qui
servent à l'entretien du presbytère et de la maison commune, du cimetière; en
celle de 25 livres, pour l'entretien du four commun; en celle de 30 livres pour
le garde-bois, en celle de 60 livres pour le garde-fruits; pour l'entretien des
passerelles sur les torrents et ruisseaux, 30 livres; pour le certificat des
assises, 6 livres; pour le cierge pascal, 6 livres; pour les ports des lettres et
paquets, 6 livres; pour les gages du mandeur de ville ou sonneur, 9 livres. Ce
qui fait en tout la somme de 222 livres3 que la communauté supplie
les Etats de lui permettre l'imposition annuellement, sans se pourvoir à
nouveau; sauf, en cas d'imprévu, à la communauté de se pourvoir pour y faire
suppléer.
21) Les comptes des
collecteurs sont rendus annuellement
22) Les pauvres n'ont
d'autre revenu que la vingt-quatrième, qui est distribuée annuellement par le
curé et les officiers. N'y ayant aucune fondation ni hôpital.
23) Le parcellaire de la
commmunauté a été fait en 17074. Il est en mauvais état, de même que
le coursier, et le tout doit être refait. Les papiers et titres sont conservés
dans un coffre à deux clefs, dont l'une entre les mains des consuls et l'autre
en celles du châtelain5.
Le présent ayant été lu dans
l'assemblée du 9 courant, la communauté l'a approuvé pour être sincère et a
donné pouvoir à Jean-François Bompard de le faire mettre au net, le signer et le
remettre aux députés aux Etats. Ce qui a été fait à Sainte-Marie, le 9 avril
1789
Signé : J.-F. BOMPARD
(1) Demeurant à la Frache et aux Granges.
(2) Antoine Chauvet, de Montjai, "prieur-curé de la Val-Sainte-Marie" le 30 mai 1781 (V 54), en fonctions le 21 août 1790 (L 472), qui prêta le serment de Liberté et Egalité le 5 octobre 1792.
(3) En 1789, le total autorisé est de 126 livres (Ordonnance du 1er oct.1790). En 1790, il est de 94 livres seulement, et, en 1791, de 222 livres, dont 45 livres pour les gages du maître d'école; 6 livres pour la sage-femme; 12 livres pour le secrétaire; 24 livres pour le garde-champêtre; 67 livres pour le receveur des contributions. (C 107, f°122)
(4) Petit in-folio de
46 feuillets seulement.
(5) Sur l'état des
archives de Sainte-Marie en 1887, voir Procès-verbaux du Conseil général des
Hautes-Alpes, août 1888, p.163.